Accompagner dans la période des fêtes

La période des fêtes est habituellement un moment de réjouissances, de célébrations, de réunions de famille, de rires et de joies. Est-ce possible de traverser ce temps de l’année dans la sérénité si nous accompagnons un proche qui se prépare à mourir? De ne pas garder que de mauvais souvenirs qui feront de tous les autres Noël des moments difficiles à vivre ?

J’y crois…mais cela dépend beaucoup de notre façon de regarder la situation, de notre attitude dans les circonstances. Nous ne pouvons rien changer à ce qui arrive, mais pourquoi ne pas utiliser sa créativité pour créer des moments authentiques qui resteront gravés pendant cette étape, mais aussi après le décès. Le temps des Fêtes est surtout devenu au fil des ans, une période de stress, de consommation et les valeurs profondes ont malheureusement perdues leur signification.

Vous avez cette opportunité auprès de votre proche ou d’un malade dont vous avez soin, de remettre ces valeurs à la bonne place. Une présence aimante et réconfortante est bien plus précieuse qu’un présent offert et l’occasion vous est donnée de vous retrouver auprès du malade et de lui transmettre tout l’amour que vous éprouvez à son égard, de passer du temps de qualité à son chevet.

Si c’est encore possible, demandez-lui ce qui lui ferait plaisir; un petit sapin dans sa chambre, un chocolat chaud, écouter de la musique, un biscuit fait maison, un plat qu’il aime particulièrement, un film qu’il affectionne, regarder la neige tomber par la fenêtre…..Et pourquoi ne pas chanter ensemble des cantiques qui lui rappelleront de beaux souvenirs…Les émotions de joie et de plaisir semblent être inappropriées  dans un tel contexte, mais ces temps d’arrêts dans le cours de la maladie sont très salutaires pour chacun pour la suite des choses. Le film « Oscar et la dame Rose » nous propose à cet effet une très belle réflexion qui vous inspirera assurément à retirer du positif de chaque situation.

Hélène Giroux
Accompagnatrice, auteure, conférencière
Écrit en déc.2015

Le mourant et le coma

Le processus de la mort comprend toute une série d’étapes que l’on peut observer au fil du quotidien, mais pour la plupart des gens, elles sont inconnues et donc effraient. Voilà bien toute l’importance de les démystifier.

Lorsque que la maladie a passablement gagnée du terrain et que la mort se rapproche, on peut souvent observer que le malade entre dans une période de coma, qui peut durer plusieurs jours, parfois même plus longtemps. Ce moment où la communication, telle qu’on la connait, n’est plus possible est souvent très déstabilisant, et lorsqu’elle s’étire, les proches, épuisés et émotifs, ressentent de l’impatience et de l’incompréhension.

Il est important de savoir que tout ce qui se vit est significatif …même le coma. Le temps est désormais compté en jours et c’est une étape transitoire où le malade effectue des allers-retours entre ici et l’au-delà, avant le grand départ. Le temps que cela prend est très personnel à chacun et nul n’en connait vraiment la raison. Mais c’est l’âme qui déterminera le moment où elle est prête à quitter les siens.

De nombreuses expériences dans cette situation ont démontrées qu’un malade dans le coma entend tout ce qui se passe, même s’il ne peut communiquer. Raison de plus pour y être attentif, pour utiliser le temps qui reste encore à signifier à cette personne combien nous l’aimons, ce que sa présence nous a apportée, peut-être aussi une belle opportunité de simplement être une présence significative à ses côtés ou encore de demander pardon…qui sait ce que ces moments d’intimité apporteront à toutes les personnes concernées.

Hélène Giroux
Accompagnatrice, auteure, conférencière
Écrit en nov.2015

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Comment se trouver auprès d’un proche mourant

Voilà bien une réalité qui nous dépasse…celle où l’un de nos proches doit quitter cette vie. Comment ne pas se sentir impuissant à leur chevet, maladroit même dans les gestes ou les paroles, démuni devant ce qui semble être irréel…..Qui n’a pas ressenti un jour ces émotions auprès d’un proche mourant ?

Peu d’entre nous sommes vraiment préparé à vivre un tel moment avec un être cher et les questions sont parfois nombreuses après le décès à savoir si l’on a fait tout ce qu’il fallait pour bien les accompagner. Il importe donc de savoir avant toute chose, que l’amour ou l’affection que vous éprouvez pour cette personne est l’outil le plus efficace.

Quand on aime, on agit avec toutes les bonnes intentions du monde et en ce sens, on ne peut faire d’erreurs…des maladresses peut-être, mais bien involontairement. Il est nécessaire d’être bon envers soi-même, car cela n’aide en rien le malade de s’abaisser ou de se juger. Soyez simplement disponibles pour cette personne et attentifs à ses besoins qui varient énormément au fil de son quotidien à travers les étapes de la maladie terminale.

Demandez-lui ce qu’elle désire et soyez respectueux de ses choix. N’oubliez pas que cette personne demeure vivante jusqu’au dernier souffle et qu’en ce sens, il est encore possible d’avoir de bons moments ensemble, ne serait-ce que dans le silence et une présence réconfortante.

Hélène Giroux
Accompagnatrice, auteure, conférencière
Écrit en oct. 2015

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Profession: accompagner les mourants

Quel étrange métier me diront certains !

On croit à tort que côtoyer la mort doit être fort déprimant et qu’une personne la moindrement intelligente ne choisirait pas un tel travail dans le quotidien. En fait il ne s’agit pas d’un travail mais d’une vocation, car il est question ici de l’humain. Et je ne crois pas non plus qu’on choisisse ce métier…cela vient d’un appel intérieur et demande tout de même un certain vécu pour s’y sentir à l’aise.

Beaucoup de gens, à moins d’être confronté à une telle situation…et encore….ignore même qu’il existe des gens, tout comme je le fais, qui font ce métier et qu’il est possible d’être accompagné dans de telles circonstances. Il faut savoir qu’il existe plusieurs possibilités aujourd’hui pour terminer ses jours. Certaines personnes se retrouvent dans un hôpital, d’autres dans des maisons spécialisées comme il en existe plusieurs au Québec ou encore ont le désir de mourir à la maison, entouré de leurs proches, dans un environnement qui leur est familier. C’est principalement là que j’œuvre dans le cours de mon travail.

Accompagner, c’est avant tout assurer une présence chaleureuse et sécurisante auprès du malade et de ses proches. Cela nécessite d’entrer dans leur intimité, dans un espace sacré et très personnel. Mais tous ont tellement besoin à ce moment qu’il est rare que le contact ne soit pas positif. La chaleur humaine, le respect de la dignité et des valeurs de chacun sont des qualités primordiales dans ce métier. Le patient se trouve alors dans ce que l’on appelle les soins palliatifs. Il n’est pas abandonné par le système médical, mais on ne parle plus ici de guérir, mais plutôt de rendre confortable. Le patient reçoit donc tout ce qui peut répondre à ce besoin, que ce soit en équipement, en soins, en médicaments. Et comme accompagnatrice, je peux répondre à tout cela dans son quotidien, les priorités étant de lui offrir de l’aide physique, psychologique et spirituelle. Son pronostic est d’habituellement moins de 2 mois.

Je sais donc pertinemment à quoi m’attendre et ce que sont les objectifs de mon travail. Nul surprise alors au moment du décès. Je connais bien les signes qui m’indiquent que la fin se rapprochent et ils me servent de guides pour évaluer la situation, répondre aux besoins du patient et préparer la famille à ce qui s’en vient. Le but principal des soins palliatifs est de donner une certaine qualité de vie au temps qui reste et bien que ce soit difficile à imaginer, il y a encore dans cette étape de vie des moments d’humanité extraordinaires ! Lorsque le patient décède, j’ai davantage la satisfaction d’avoir pu faire une différence dans ce bout de chemin difficile d’accès pour la plupart d’entre nous.

Malgré la tristesse de perdre un proche, la plupart des gens pour lesquels j’ai ainsi accompagné un proche, ont à l’unanimité exprimé à quel point cette expérience avait été formatrice. Tous en sortent positivement bouleversés, voyant la mort autrement, l’ayant quelque peu apprivoisée. Cela change considérablement leur vision des choses et est souvent transformatrice pour leur propre parcours. Bien des préjugés tombent, des peurs s’atténuent considérablement.

Quant à moi je suis toujours émerveillée de constater à quel  point l’humain est d’une richesse intérieure incroyable, car au delà de leur corps détérioré, c’est davantage à l’âme que je touche…et de cela je me sens extrêmement privilégiée.

Hélène Giroux
Accompagnatrice, auteure et conférencière
Écrit pour le blog de Thibault, mars 2013

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hegir@hotmail.com

« Le privilège d’accompagner….choisir de côtoyer la mort », aux Éditions La Plume D’Oie
Mai 2012 (disponible par l’auteure)

L’apprentissage de la vie au seuil de la mort

Oser dire que je côtoie la mort par choix fait toujours grandement réagir les gens que je croise sur ma route.

Cette réalité fait tellement partie de mon quotidien que j’oublie parfois que la mort est encore un sujet tabou. Elle est pourtant inscrite dans notre plan de vie dès le moment de notre naissance et est le chemin pour chacun d’entre nous ; nous ignorons seulement quand et comment elle surviendra.

Raison de plus à mon avis pour s’en préoccuper, surtout quand je constate que la majorité des gens que j’accompagne ces dernières années sont atteints de cancer et principalement âgés entre 50 et 62 ans. Je peux très bien m’imaginer que ce n’était nullement une option qu’ils envisageaient à cette période de leur vie….

Accompagner les mourants est un métier marginal j’en conviens et beaucoup de gens ignorent même qu’il existe, que des gens sont disposés à soutenir un malade et ses proches, à moins d’avoir été confronté à cette situation. Je n’avais pas prévu non plus aller dans cette direction dans mon plan de carrière, car j’ai moi-même longtemps été rébarbative à aborder le sujet. Les choses ont bien changées.

Jeune, je rêvais de devenir infirmière car j’étais attirée par le milieu hospitalier et j’aimais aider les gens. Mais ma vie a pris une autre direction ; je me suis mariée et ai par la suite consacré plusieurs années de ma vie à l’éducation de mes 2 fils.

J’ai un jour suivi une formation en accompagnement, non pas pour en faire un travail mais comme démarche personnelle pour explorer cette question délicate de la fin de vie. J’ai développé ensuite à ma grande surprise, tout un intérêt pour la question et ma vie a pris un nouveau tournant depuis!

Je me rappelle comme si c’était hier, mon premier accompagnement où la peur de ne pas être à la hauteur me tenaillait. L’expérience s’est toutefois avérée très positive et a été transformatrice, bien au-delà de mes espérances.

J’ai réalisé que les connaissances acquises au fil des ans par mon expérience de vie, les formations, les nombreuses lectures et ateliers étaient fort utiles pour me donner un ancrage, mais qu’ils n’étaient pas les seuls outils nécessaires pour devenir une bonne accompagnatrice.

Davantage encore que les techniques, un amour profond pour l’être humain, un désir de vouloir faire une différence dans le dernier tour de piste et une capacité de pouvoir utiliser l’empathie dans mes contacts avec ces gens étaient plus essentiels encore pour œuvrer dans cette sphère d’activité particulière.

Accompagner est avant tout une vocation et un appel du cœur qui demande à développer de nombreuses forces et qualités : intuition, écoute, sensibilité, respect, patience, générosité etc…. Je compare l’accompagnement des mourants à un cours de croissance personnelle en continue, qui m’interpelle sans cesse à m’interroger, à me remettre en question, qui m’invite aussi par un travail d’intériorité à ne pas prendre les choses de façon personnelle.

Chaque personne que je rencontre, que ce soit le malade ou ses proches m’offrent une occasion extraordinaire de grandir et d’évoluer et je suis sans cesse étonnée de constater tout le cheminement que cela me permet de faire comme être humain.

J’ai toujours cru que notre présence sur terre devait servir à l’évolution de l’humanité et que chaque personne avait un rôle à y jouer pour son avancement. La richesse de chaque être humain m’est confirmée jour après jour. Nous sommes tous riches de potentiel à découvrir et nous nous devons aussi de permettre à chacun de reconnaître sa propre valeur en ce monde. Cette façon de faire et de penser donne tout un sens à mon existence et je suis convaincue qu’elle donnera aussi un sens à ma propre mort.

Cela peut paraître étrange, mais je ne me suis jamais sentie autant vivante et heureuse que depuis que j’accompagne des mourants. La raison en est fort simple ; nous avons malheureusement tendance à prendre les choses et les gens pour acquis, à croire qu’ils dureront toujours. Toutefois, lorsque la mort fait partie de notre paysage quotidien, la conscience que la vie est précieuse et fragile amène naturellement à voir la vie autrement.

Les gens sur le point de mourir sont d’extraordinaires enseignants dont nous devrions privilégier le contact. Malheureusement, la peur de la mort et les tabous reliés à cette étape de vie véhiculés par l’ignorance, invite bien plus souvent à l’éviter ou à la fuir.

Je suis toujours étonnée de réaliser que plus je côtoie les mourants, plus j’aime leur contact. Il faut dire qu’à cette étape de vie, celui-ci n’a plus rien à prouver à personne ; il laisse bien souvent tomber les masques et se trouve davantage dans l’authenticité. Les rapports sont alors plus vrais, se rapprochant même parfois de la spontanéité d’un enfant.

En faisant son bilan de vie, la personne dont le temps est compté a le grand désir de partir le cœur léger, de lester ses bagages ; c’est pourquoi des regrets ou des pardons peuvent s’exprimer, permettant bien souvent une libération salvatrice. Lâcher prise est plus aisé lorsque le cœur est léger. Bien que cela ne soit pas toujours possible, je peux souvent l’observer au fil de mes accompagnements.

Le mourant réalise aussi que l’accumulation de ses biens ou qu’un compte en banque bien garni ne peut être échangé contre un retour à la santé et que tout cela ne peut non plus être amené avec lui au moment du départ. L’impression d’y avoir  investi trop de temps et d’énergie, amène parfois de la tristesse d’être passé à côté de l’essentiel. Malgré ces constatations, la plupart affirment qu’ils ne changeraient rien à leur vie s’il leur était donné de la recommencer.

Le plus beau cadeau que j’ai reçu à accompagner, c’est de constater que la valeur première qui demeure à la fin malgré toutes nos différences est l’amour, fondement même de tout être humain. C’est de cette manière que nous sommes tous inter reliés et que nos actions et nos paroles peuvent avoir un impact significatif sur la vie des gens qui croisent notre chemin. Raison de plus pour faire en sorte que chacune de ses actions, de ses paroles soient posées dans l’objectif d’apporter une différence, de laisser une trace de notre passage sur terre.

Alors que la majorité des gens voient la mort comme une injustice et aborde le sujet en des termes sombres et déprimants, mon contact fréquent avec celle-ci me permet au contraire de regarder les choses différemment, d’y voir davantage les aspects positifs de ces enseignements qui m’apprennent à mieux vivre.

Si j’apprenais qu’il ne me reste que peu de temps à vivre, ne voudrais-je pas utiliser ce précieux temps pour donner du sens à cette dernière étape de mon parcours, pour utiliser chaque journée, chaque heure et chaque minute à sa juste valeur ? Et pourquoi au fait, devrais-je attendre un ultimatum comme une maladie terminale pour vivre avec plus de conscience, pour habiter l’instant présent ou pour avoir des relations significatives avec les gens de mon entourage ? Vivre ainsi au jour le jour changerait beaucoup de choses dans notre existence.

Je suis bien sûr consciente à travers ces contacts particuliers que la mort s’accompagne aussi de tristesse, de souffrances, de deuils multiples, mais comme tout ce qui vit, tout finit aussi par s’éteindre un jour.  Pour moi, la naissance comme la mort sont simplement des passages importants et sacrés de notre parcours terrestre.

Il est normal dans notre façon de voir la vie de souligner la naissance, de la célébrer et la mort à mon sens mériterait autant d’égards, puisqu’elle souligne et honore la vie de celui ou celle qui s’éteint et cela peu importe qui est cette personne.

Toute vie est sacrée car elle enrichie celle de ceux qu’elle croise dans le parcours de sa mission ici-bas. C’est pourquoi je me sens réellement privilégiée de côtoyer tous ces gens et que même le peu de temps qu’il nous ait donné de se connaître devient un cadeau.

Je ne suis pas triste au moment du décès. Connaissant l’objectif de ma démarche auprès de ces gens, je m’applique davantage à donner une valeur au temps qui reste par une qualité de présence. Je peux ainsi dire mission accomplie, tout en éprouvant beaucoup de reconnaissance pour avoir pu rencontrer ces personnes qui m’ont toutes offertes de très belles leçons dans mon parcours de vie.

Je poursuis ensuite ma route, transformée et remplie de gratitude. Tant de personnes ont besoin de ce regard d’amour posé sur eux, particulièrement à un moment aussi déterminant de l’existence que l’approche de la mort. Quelle belle mission que la mienne !

Hélène Giroux
Accompagnatrice, auteure et conférencière
Écrit en nov.2015