Honorez la mort comme la vie

La mort est encore pour plusieurs, un sujet tabou. On la voit bien souvent comme la fin de tout. Ceci étant dit, nous avons tout intérêt à prendre conscience que la mort est une étape sacrée de notre parcours de vie, car cette expérience est toute aussi importante que celle de la naissance et que toutes les autres étapes qui se situent entre les deux. Honorer la mort nous aide à l’apprivoiser et à donner un sens encore plus grand à notre existence.

La mort unit toutes les formes de vie, car tout ce qui vit, mourra un jour. Elle représente le point culminant de tout l’accomplissement d’un être au cours de son existence et peu importe l’âge à laquelle on y fait face, la mort est une étape importante, tant pour la personne qui quitte  le plan terrestre que pour ceux qui y demeurent. Il n’y a pas d’erreur ou de fin prématurée en regard du grand plan de la vie.

Il peut être réconfortant de croire que nous soyons destinés par notre passage sur terre à accomplir quelque chose et faire une différence. Il est vrai qu’au moment de la mort notre existence se poursuit; une parcelle de nous demeure vivante par les moments que nous avons partagés avec autrui, l’amour que nous avons semé. Chaque être humain a le potentiel de transmettre un savoir et de faire sa part dans le grand projet collectif qu’est l’humanité. Quand la mort se manifeste, le travail se poursuit par la contribution apportée.

La mort peut être vue comme une injustice et peut même parfois paraître cruelle, elle est pourtant une étape naturelle et inévitable sur notre chemin de vie.

Saluer ce qui a été, permet au moment de la mort d’une personne qui nous est chère, de garder le meilleur de son parcours. Nous pouvons ainsi être reconnaissants de l’avoir connu lors de son passage dans notre vie et poursuivre notre route avec plus de sérénité, chacun continuant son chemin dans des directions différentes. L’amour que nous avons pour la personne continu d’exister. Son âme, et les souvenirs qui sont liés à elle demeurent. En mettant  l’emphase sur cet héritage, on développe la conscience que cela restera toujours en nous, au-delà du temps.

La mort fait partie de la vie. Et, honorer la mort c’est célébrer la vie. Célébrer la vie, c’est accueillir la mort comme l’occasion d’un chemin qui se poursuit.

Principe élaboré dans le livre de Lise Marie Boudreau – « Congédiez vos gourous », publié en septembre 2017, Éditions Le Dauphin Blanc

 

 

Un ange nommé Hélène Giroux

Article écrit par la journaliste Isabelle Maher et publié sur le blog du site : www.lederniermot.com
Service de rédaction professionnelle de récits nécrologiques permanents.

 

La télé hurlait à pleine tête dans la petite chambre d’hôpital. Pierrette vivait les dernières heures de sa vie. Au chevet de la dame de 76 ans, son fils et sa nièce, Hélène Giroux.

« La voisine de lit se mêlait de notre conversation par-dessus le son de sa télévision. Je ne pouvais pas croire que ma tante allait mourir comme ça », se disait Hélène qui a demandé et obtenu que la patiente soit installée dans un endroit plus paisible de l’hôpital.

« On nous a trouvé un petit coin tranquille. Nous avons fait jouer Les Quatre Saisons de Vivaldi. Elle a attendu à la toute fin et elle est partie. C’était un cadeau de me permettre d’être là », raconte, encore émue, celle qui venait d’accompagner son premier humain dans la mort.

Depuis 10 ans, Hélène Giroux a tenu la main de plus de 200 personnes jusqu’aux derniers moments de leur vie, presque toujours à leur domicile, moins de deux mois avant leur décès. Sa clientèle est âgée entre 54 et 62 ans, des cas de cancer pour la très vaste majorité.

« Chaque fois, c’est différent, chaque humain est unique. Chaque fois, je développe de nouveaux outils. Je ne saurai jamais tout de l’accompagnement des mourants », affirme-t-elle.

Contrairement à la croyance populaire, accompagner des mourants n’a rien de triste ou de déprimant. Les gens ne voient que les mauvais côtés de la mort, observe l’accompagnatrice de 57 ans qui se dit pourtant honorée d’accompagner les gens en fin de vie.

Quand le superficiel prend le bord

« On va à l’essentiel quand le temps est compté. Le superficiel prend le bord lorsque l’on est dans l’urgence, on ne parle pas de la météo… », explique celle qui a d’abord brièvement travaillé comme préposée aux bénéficiaires avant de suivre une formation de bénévole en soins palliatifs à la Maison Albatros.

Hélène Giroux, accompagnatrice

Beaucoup de gens préfèrent mourir à la maison, observe madame Giroux. Les familles des personnes en fin de vie qui font appel aux services de l’accompagnatrice sont souvent complètement démunies, elles ne dorment plus et sont épuisées.

« Certains ne veulent rien savoir d’un accompagnement. D’autres attendent trop avant de demander de l’aide. Pourtant, je suis convaincue que mon travail est essentiel. Après le décès, il reste entre nous un lien spécial, c’est tellement intense », confie-t-elle.

Comme tout le monde, Hélène ignore tout du moment où la mort viendra. C’est toujours surprenant, dit-elle, mais certains signes ne mentent pas. Parfois, des familles se confortent en projetant la personne en fin de vie dans certains projets qui auront lieu dans beaucoup trop longtemps.

« Mon rôle est aussi de les ramener délicatement à la réalité en leur disant de peut-être penser à plus court terme », raconte-t-elle.

Être présent auprès des gens confrontés à la mort ne se résume pas à leur tenir la main, explique Hélène Giroux. Accompagner, c’est aussi rassurer la famille qui affronte ce grand tabou. La mort est une « expérience sacrée » devant laquelle il faut rester humble et suivre le rythme du patient, ajoute-t-elle.

« Notre travail n’est pas de les amener à la sérénité. Ce n’est pas moi qui décide. Le maître, c’est celui qui est en train de mourir. Il faut rester là et lui donner le droit de vivre ce qu’il a à vivre, insiste-t-elle. Dans un accompagnement, il n’y a ni croyance ni religion. On accompagne un humain. »

Après la mort, l’accompagnatrice ne quitte jamais la famille avant que le corps ne soit emmené. C’est elle qui prévient le CLSC pour qu’un médecin vienne constater le décès. Elle communique également avec le salon funéraire désigné afin que les employés viennent chercher la dépouille.

« Je m’occupe de la toilette du défunt, je l’habille selon les volontés de la famille, je range tout le matériel médical et je m’assure que chacun ait la chance de bien saluer l’être aimé. Après le départ du défunt, je refais le lit et j’y dépose une fleur », relate-t-elle.

La mort enrichit la vie

Celle qui a vu mourir tant de gens croit que la mort enrichit la vie, c’est un grand honneur d’assister à la mort de quelqu’un que l’on a aimé, plaide-t-elle. Pourtant, comme bien des gens, Hélène Giroux a déjà eu peur de la mort. Avec le temps, sa vision a bien changé.

« Plus ça va, plus je pense que nous avons tous notre humble part à apporter dans ce monde pour faire une différence. L’âge de notre départ n’a pas d’importance. La mort est un passage, ton corps physique te quitte parce qu’il a fait ce qu’il avait à faire », pense-t-elle.

Accompagner des humains dans la mort et en faire un travail demeure très marginal. C’est aussi le premier service qui prend le bord à l’heure des coupures dans les soins de santé. Il n’est pourtant pas exagéré de dire que c’est un service essentiel, croit Hélène Giroux.

« Peu de gens sont préparés ou informés sur le processus de la mort. Que ce soit des proches aidants au chevet d’un mourant et même des soignants du milieu des CHSLD et des hôpitaux, tous manquent d’outils et de connaissances », observe-t-elle.

Auteure de trois ouvrages sur ce sujet qui la passionne, Hélène Giroux se sent encore souvent comme une « défricheuse ».

Une défricheuse devant la grande faucheuse.

Isabelle Maher

Coeur d’enfant

Les enfants nous fascinent à peu près tous. Nous admirons leur spontanéité, leur fraîcheur et leur candeur. Ils n’hésitent pas à dire ce qu’ils pensent, à agir sur le coup de l’impulsivité. Ils sont branchés directement sur l’instant présent, ne se préoccupent pas de ce que pensent les autres et se laissent porter par leurs élans du cœur. C’est comme si le temps pour eux s’était arrêté et qu’ils vivaient dans un monde parallèle au nôtre, dans un espace où la magie et le mystère en font partie.

Je me rappelle que toute petite, vers l’âge d’environ 5-6 ans, je m’allongeais sur le trottoir et pouvait observer pendant des heures, de simples fourmis aller et venir dans leur nid. Je ne voyais pas le temps passer et était littéralement fascinée par ce qu’il m’était donné d’observer. C’était comme si j’entrais dans leur univers et que j’en faisais partie.

Suffit-il de grandir pour perdre cette connexion avec l’âme ? Je le crois de moins en moins. En fait cette petite partie de nous qui se nourrit dans l’imaginaire, la créativité et la joie de vivre est toujours quelque part tapie à l’intérieur de nous, dans un lieu secret qui cherche seulement à se protéger du regard d’autrui…car il n’est pas toujours bien vu qu’un adulte s’amuse comme le ferait un enfant.

Côtoyer des petits permet de faire des choses qu’un adulte ne fait pas souvent seul , par crainte du ridicule : faire un bonhomme de neige, regarder voler un cerf-volant, faire des bulles ou construire un château de sable sur la plage, lancer des cailloux dans l’eau…..

Je permets maintenant beaucoup plus souvent à mon enfant intérieur de s’exprimer, de vivre de ses passions, de se nourrir d’un peu de folie et c’est tellement agréable ! Je réalise en fait qu’il est davantage nécessaire de le libérer de ses carcans et de ses préjugés, alors que je suis dans le monde adulte qui permet peu cette spontanéité et ce regard plus léger sur l’existence.

Il n’y a pas d’âge pour retrouver son cœur d’enfant…il ne demande qu’à éveiller ma conscience sur les bienfaits qu’un peu de magie peut apporter dans ma vie. On a l’âge de son cœur, pas celui des années sur un calendrier…alors vivement les bulles et les jardins de fées !

Hélène Giroux
Accompagnatrice
Article en juillet 2016

L’abondance dans l’accompagnement

Ces deux mots peuvent sembler incompatibles. Et pourtant, j’ai le privilège de vivre  tous les jours l’abondance, dans chaque accompagnement que je fais. Car oui, j’ai choisi cette vocation plutôt particulière, mais combien gratifiante et élevante même, devrais-je dire, de me trouver auprès des personnes qui se préparent à quitter cette vie.

La mort est davantage perçue comme quelque chose qu’on nous retire, pas qu’on ajoute, à notre parcours terrestre. Et il faut dire qu’on a souvent tendance à associer l’abondance à des choses matérielles, alors qu’elle est présente dans bien d’autres sphères de nos vies. Mais comment puis-je donc arriver à dire, qu’elle me permet de vivre dans la gratitude, l’émerveillement et surtout l’abondance ?…

Je sais, c’est difficile à saisir et cela ne veut pas dire que je ne vive pas d’émotion lorsqu’une personne quitte cette vie pour poursuivre sa route ailleurs. Mais je vis aussi bien d’autres choses dont on n’imagine même pas la portée, dans ces moments sacrés!

Tiens, je repense par exemple au dernier accompagnement que j’ai fait. Un homme de 97 ans. Bon d’accord me direz-vous, il a vécu toute une vie et il est normal de quitter celle-ci à un âge aussi avancé.

Il importe de savoir que pour moi, le temps de vie dans sa longévité n’est plus un absolu. On peut mourir à tout âge et même si dans notre vision des choses, il n’est pas « normal » de quitter cette vie à 40 ans, je crois tout de même profondément, qu’on « retourne à la maison » quand notre mandat de vie est terminé. Le sien a juste été plus long.

Cet homme a été un résilient et un pacifique toute sa vie et il s’est appliqué à mettre en place dans son parcours, des règles de vie qu’il avait choisi et qui lui étaient fondamentales pour être heureux ; comme par exemple, ne pas porter de jugement, aider toute personne qui a besoin, sourire, ne pas gaspiller son temps à critiquer ou à gémir sur son sort, etc….Ces règles de vie ont été trouvées par sa famille après son décès et lu le jour de ses funérailles. Je le reconnaissais tout à fait dans ces belles valeurs, en écoutant ce texte !

J’ai connu cet homme alors que j’accompagnais sa conjointe qui se mourait d’un cancer. Elle est décédée depuis quelques années maintenant. Nous avons gardé un certain contact et quand ce fut à son tour d’en perdre physiquement et d’être hospitalisé, la famille a naturellement fait appel à moi pour l’accompagner. Je me suis trouvé à son chevet de nuit, durant un mois.

J’étais émerveillée de constater à quel point cet homme ne se plaignait jamais de son sort et était tout sourire pour chacun. Même au moment où il a su qu’il ne pourrait plus retourner chez lui, il a continué à être résilient et à préserver sa bonne humeur.

Les cadeaux que j’ai reçus à son chevet sont tout, sauf matériels ou monétaires. Il se réveillait et quand il me voyait à ses côtés, il me faisait le plus beau des sourires. Je lui prenais la main qu’il tapotait toujours en signe d’appréciation et me demandait si j’avais bien dormi et si j’étais confortable. Quel homme charmant !

Chaque fois que j’accomplissais une tâche pour lui, si petite soit-elle, il me disait « Merci ma fille » et me tapotait à nouveau la main. Et quand je quittais le matin venu, il n’omettait jamais de me remercier chaleureusement pour « mes bons services », m’exprimant combien il était reconnaissant que je sois là.

Sa vision de la vie, sa manière d’être attentif et reconnaissant pour toute l’abondance affective qu’il vivait autour de lui, lui a permis de vivre et de terminer sa vie dans la plus grande sérénité et dans un état de conscience peu ordinaire.

Le dernier matin avant son départ, que je n’avais pas vu venir vu sa grande lucidité, je me préparais comme à l’habitude à le quitter pour aller dormir. Il m’a encore souri, remercié et m’a dit qu’il se sentait un peu fatigué pour se lever tout de suite. Je l’ai encouragé à rester au lit encore un peu, que rien ne pressait de se lever tout de suite. Il m’a souri, embrassé et ce fut notre dernière rencontre.

On m’a raconté par la suite que sa sœur s’est présenté à son chevet et l’a aussi encouragé à fermer les yeux et à se reposer encore un peu, alors que des membres de la famille jasaient dans la chambre. Il a souri et salué tout le monde et s’est mis à chanter « Ferme tes jolis yeux… ». Quelques minutes plus tard, il avait rendu l’âme, sans tambour ni trompette.

Cet homme extraordinaire m’a laissé tellement de cadeaux de sa belle présence ! Comment ne pas me sentir privilégié d’accompagner les gens à travers cette expérience de la grande traversée ! Et ce n’est pas la première personne de qui je retire autant. En fait il y a plein d’histoires comme celles-là que je pourrai vous raconter où j’ai reçu des présents inestimables, qui enrichissent ma vie et mon expérience ici-bas !

Alors oui, il m’est donné lorsque j’accompagne, de me sentir infiniment choyée,  à travers toutes ces formidables personnes que j’ai le bonheur de côtoyer. Et même dans un contexte aussi exigeant que la fin de vie d’un autre être humain, il est possible de transformer cette étape, par un regard différent, axé non pas sur le manque ou le moins, mais sur le plus que de telles relations ou de tels échanges peuvent nous apporter…et je peux vous dire qu’il y en a toujours !

Même les expériences d’accompagnement les plus difficiles que j’ai vécus m’ont toutes apportées une leçon, un enseignement, une prise de conscience, un changement de perception…et pour cela je suis infiniment reconnaissante ! Oui l’abondance est partout, même dans l’étape finale de notre traversée, la mort. Ne la craignons pas, mais approchons-nous de plus près pour entendre ce qu’ils ont à dire ou à nous offrir en héritage…

Hélène Giroux
Accompagnatrice, auteure, conférencière
Écrit pour Holistik magazine, mai 2016
www.facebook.com/accompagnementetsoins

 

La mort, une ennemie ?

Nous allons tous mourir !
Mais pourquoi donc alors vivre sans tenir compte de cette réalité ?

Non, ça n’arrive pas qu’aux autres, nous y passerons tous, sans exception d’âge, de religion, de classe sociale ! Je ne viens pas de faire une découverte majeure…nous savons tous que nous allons mourir depuis notre conception. Cette destinée est le chemin pour chacun et bien que la science, les technologies et la médecine évoluent à un rythme dont on a parfois peine à suivre la progression, nous continuons de voir la mort comme un échec, une injustice et elle demeure taboue dans une société que l’on dit évoluée.

Je suis surprise et ne le suis pas en fait. Avant de côtoyer moi-même la mort d’une façon régulière dans mon quotidien, je voyais aussi les choses un peu de cette façon. Plus maintenant. J’accompagne depuis plusieurs années des mourants qui souhaitent terminer leurs jours à la maison et cette vocation a eu tout un impact sur mon existence et ma manière de vivre.

On a parfois malheureusement tendance à prendre les choses et les gens pour acquis, ce qui en fait, les banalise, les rends ordinaires, habituels, normaux…. On se croient éternels et on pense qu’on a toute la vie devant nous. Je ne peux toutefois faire autrement que de constater que la majorité des patients que j’accompagne ces dernières années sont atteints de cancer et que leur âge moyen se situe entre 50 et 62 ans. Ces gens ont travaillés fort toute leur vie pour tenter de se préparer une retraite confortable et ils n’ont même pas eu le temps d’arriver à cette étape, de réaliser les objectifs qu’ils s’étaient fixés.

Je fais partie de cette catégorie d’âge là…. Il y a de quoi réagir ! Il faut dire que de toute façon, côtoyer la mort aide à remettre les choses en perspective, à redéfinir mes valeurs, à faire des bilans, à demeurer le plus possible dans l’instant présent, à garder mon attention fixée sur l’essentiel.

Et l’essentiel c’est quoi au juste ?

.Moins travailler et faire des choix davantage en harmonie avec mes valeurs, pas seulement basés sur mes insécurités et mes peurs….
.Avoir des relations significatives avec les gens que je côtoie…..
.Prendre le temps de faire des choses que j’aime et qui me font plaisir et éviter  d’attendre uniquement un jour d’avoir le temps…..
.Apprécier la nature autour de moi, les changements de saison apportant chacune leurs joies….
.Réaliser mes rêves pendant que j’ai la santé…
.Entretenir mes amitiés pour éviter de les perdre parce que je les ai négligé….
.Éprouver de la gratitude pour ma vie en ce moment…..
.Ne pas attendre seulement une occasion spéciale pour utiliser mes beaux objets, pour porter mes vêtements neufs……
Et combien d’autres choses ! La liste peut s’allonger encore et encore…

Si j’apprenais aujourd’hui qu’il ne me reste que quelques semaines à vivre, qu’aurais-je le goût de faire maintenant ? Il est bon de se poser la question, de se mettre soi-même dans cette situation quelques minutes…les choses qui ont de l’importance pour vous se manifesteront d’elles-mêmes sans effort. Les valeurs qui vous sont chères seront mises en lumière. Les gens qui ont une place particulière dans votre cœur seront dévoilés à votre conscience.

Ce qui compte le plus pour vous sera tout à coup évident, clair et simple, sans encombrement du matériel que nous accumulons au fil d’une vie. Ce sont toutes ces choses qui donnent réellement un sens à notre vie, qui nous offrent justement la sensation d’être vivant et heureux. Pourquoi alors attendre un ultimatum ou l’annonce d’une maladie terminale pour agir, pour mettre tout cela en application aujourd’hui même, maintenant que c’est encore possible.

Vivre ainsi nous donnerait justement moins l’impression que ces événements sont une injustice ou qu’on ne mérite pas que ça nous arrive. Personne ne « mérite » de mourir, c’est simplement notre destinée à nous les humains et vivre au jour le jour avec plus de conscience, en s’attardant à ce qui importe pour nous éviterait bien des regrets et des remords au moment du bilan final.

Il va s’en dire que cela changerait aussi radicalement les rapports que nous avons avec autrui. Au lieu de juger, de comparer, de s’attarder aux petits travers, de faire des histoires avec un rien, de crier…nous voudrions avoir des échanges où chacun serait préoccupé des gestes à poser, des paroles à prononcer…parce que chaque personne par son unicité peut faire une différence en ce monde, nous enrichir par sa présence, faire avancer l’humanité par son apport personnel.

Cela semble être un idéal inatteignable et peut-être me dira –t-on que je rêve en couleur et que tout cela est impossible…je n’en crois rien. Je suis convaincue que si chaque personne avait conscience que sa vie pouvait se terminer demain, sa façon de vivre aujourd’hui serait bien différente. Je ne dis pas que c’est facile dans un monde où la performance, l’acquisition de biens et l’image sociale sont les valeurs qui priment, mais ça ne veut pas dire que vivre autrement n’est pas possible.

J’entends souvent la phrase « Mais je n’ai pas le choix…. ». Désolée, mais même quand on pense qu’on n’a pas le choix, il y a des choix possibles, c’est juste que je décide d’assumer les conséquences des choix que je fais. J’ai choisi d’être heureuse maintenant, pas plus tard…car plus tard, je pourrais ne plus y être. Votre vie vous échappe t’elle maintenant ? Il n’est pas trop tard pour faire une remise en question…la vie est trop courte pour se la rendre plus difficile qu’elle ne l’est en réalité.

Hélène Giroux
Accompagnatrice, auteure  et conférencière
Écrit en février 2013