En partant, le sujet est tabou. Comme on en parle peu, la plupart des gens ignorent qu’il y a des personnes comme moi, qui choisissent d’accompagner les malades et leurs proches à ce moment significatif de leur parcours.
J’accompagne principalement à domicile, bien qu’ailleurs soit aussi possible et je suis bien consciente d’être au départ une étrangère pour les familles. Cette étape de la vie d’un être humain est intime et déstabilisante. Qu’est-ce qu’une inconnue viendra faire ici, se demande t’on bien souvent ?
La présence d’une personne d’expérience, chaleureuse et respectueuse peut faire toute la différence justement, en permettant au malade comme à leur famille, de se sentir épaulés et rassurés. Bien que cette étape soit exigeante et émotive, elle recèle aussi de formidables enseignements et des cadeaux d’authenticité relationnelle si on y porte attention.
L’accompagnatrice, par son expérience et son contact fréquent avec la mort, peut très bien guider les proches et le mourant à travers toutes les étapes du processus de la mort et les préparer à ce qui vient. Elle offre également un répit significatif à la famille qui, prise dans les émotions, peut se sentir écrasée par le poids de la situation.
Pouvoir compter sur une personne fiable pour prendre soin du malade est rassurant et permet aussi de se réapproprier son rôle de parent, en confiant celui de soignant à une autre expertise. Cela ne veut pas dire que la famille perd sa place au chevet du malade, bien au contraire. C’est davantage un travail d’équipe et de collaboration, où chacun a son rôle à jouer et c’est la famille qui est la mieux placée pour raconter qui était cette personne dont la vie s’achève….
Toutes les familles m’ont exprimées que bien que difficile, le fait d’avoir accompagné leur proche et d’avoir été soutenus dans cette aventure inconnue, a vraiment offert une qualité de temps aux derniers moments de vie et permis de regarder les choses autrement, d’en ressortir grandi même. Côtoyer la mort permet de la démystifier et demeure le plus beau cadeau à offrir à une personne chère, lorsque le contexte et l’aide appropriée sont disponibles.
Malheureusement, les proches qui ont l’impression de pouvoir y arriver seuls, attendent bien souvent d’être épuisés avant de demander de l’aide de l’extérieur, ce qui modifie grandement leur expérience, laissant parfois des séquelles émotives difficiles à libérer par la suite.
Il faut penser que lorsque le temps est compté, le malade et la famille, comme l’accompagnatrice arrivent rapidement et presque instantanément même, à créer des liens significatifs dans le contexte et à se sentir suffisamment en confiance pour vivre autrement l’expérience. Les avantages à y trouver ? La perception de la mort s’en trouve modifiée et le travail du deuil également facilité pour chacun. Une option qu’il vaut la peine d’envisager lorsque confronté à une telle situation.
Hélène Giroux, Accompagnatrice, auteure, conférencière Article écrit en novembre 2013 pour ARRSanté
« Le privilège d’accompagner…choisir de côtoyer la mort », Éditions La Plume d’Oie, mai 2012, disponible directement par l’auteure