Les deuils de la vie

Un deuil de vie, ce n’est pas seulement le départ d’un être cher après une longue maladie, c’est aussi un enfant qui quitte la maison pour poursuivre ses études ou s’installer dans une autre contrée, un déménagement où l’on doit refaire tous ses repères et créer de nouveaux liens sociaux, une séparation qui nous déstabilise un moment, la vente de la maison familiale et des souvenirs accumulés au fil d’un parcours, un changement d’emploi qui nous demande mille et un rajustements quotidiens, le corps qui se modifie avec le temps et qui nous montre ses faiblesses…et combien d’autres choses
encore !

La vie est  une suite de tous ces petits et grands deuils dont nous préférerions bien nous passer dans notre existence. Mais chacun d’entre eux nous offre l’opportunité de nous dépasser, de grandir, d’apprendre, de développer en nous ces forces de résilience, d’adaptabilité, de retenir de précieuses leçons qui nous permettront de faire un autre bout de chemin. Et j’ai remarqué au fil de mes expériences de vie que ce sont bien souvent les moments les plus exigeants, qui nous amènent le plus souvent à cheminer…pas tout de suite j’en conviens, mais dans le temps, après que nous acceptions de regarder les choses d’une autre perspective.

Je me souviens d’une époque où la maison que j’habitais a été détruite par le feu. Mon conjoint de l’époque avait perdu son emploi depuis un moment et était déprimé, mes deux fils avaient 10 et 11 ans, je travaillais seulement quelques heures semaine…cet événement où nous avons tout perdu ne venait pas améliorer notre situation et nous avons dû dépendre de la charité de notre entourage et de la communauté, pour se réinstaller quelque part et tenter de reprendre le cours du quotidien.

J’ai toujours cru que rien n’arrivait pour rien…et bien que sur le coup je ne comprenais nullement pourquoi cela se rajoutait à nos difficultés déjà bien présentes, j’ai tout de même rapidement réalisé que cet événement où le matériel était réduit en cendres, me connectait avec l’essentiel des valeurs qui donnent du sens à la vie : l’entraide, la collaboration, la générosité, l’ouverture, l’affection, l’écoute, l’amour véritable…Je dois avouer que j’ai appris dans cette situation l’une des plus belles leçons de mon parcours…soit que lorsqu’on pense n’avoir plus rien, il reste encore l’essentiel.

Je regarde aujourd’hui mon métier d’accompagnatrice auprès des personnes en fin de vie et qui me demande continuellement de lâcher-prise sur des gens avec lesquels j’ai créé des liens…..et je me dis que la vie est tellement bien orchestrée ! Ce lâcher-prise important que j’ai dû faire au moment où j’ai tout perdu, me permet aujourd’hui de les laisser poursuivre leur chemin, libre de toute attache de part et d’autre et de pouvoir ensuite continuer ma route vers d’autres gens qui ont besoin de mes services.

La vie ne pouvait pas mieux me préparer à œuvrer dans cette direction.
Acceptons que la vie est parfaite et que tout a sa raison d’être dans notre évolution.
Cette vision aide grandement à préserver l’espoir que les leçons se présenteront au moment opportun….

Hélène Giroux
Accompagnatrice, auteure, conférencière
Écrit en juillet 2016

La peur de la mort

Lors d’une récente entrevue, on m’a posé la question, « Pourquoi avons-nous peur de la mort ? » J’avoue que je n’ai pas trouvé de réponse précise à offrir. On entend souvent dire qu’on craint davantage la souffrance que la mort, mais à mon avis, cette question mérite une réflexion bien plus profonde encore sur laquelle je continue de méditer.

A-t-on peur de la mort parce que nous n’avons plus de repères ? La religion occupait autrefois une place très importante pour le sens du parcours terrestre et les valeurs sur lesquelles le quotidien était centré. Je suis loin d’affirmer qu’on doive revenir à ces temps qui étaient répressifs et limitatifs, mais on a peut-être jeté le bébé avec l’eau du bain….

Serait-ce parce que notre société est beaucoup trop axée sur le « Faire », la compétition, la productivité et la jeunesse éternelle ? Il est sûr que cela n’aide en rien de se savoir démuni ou dépendant par la maladie et d’avoir l’impression d’être inutile, sans identité personnelle, de ne plus être considéré comme un être humain à part entière à cause d’un corps détérioré et d’une vie qui s’achève….

Serait-ce par peur de la séparation d’avec les nôtres ? Cette question pèse lourd dans la balance. Étant des êtres de relation, il est certain qu’on ne souhaite pas cette séparation, qu’on veut l’éviter le plus longtemps possible et qu’on s’accroche même parfois farouchement à ceux et celles qui nous entourent.

Mais serait-ce aussi une question de vision et de croyance ? C’est à mon avis fort possible. Je regarde mon cheminement depuis que j’accompagne des gens en fin de vie et je peux sincèrement dire que ma vision de cette étape s’est beaucoup transformée au fil des années et des nombreux accompagnements effectués.

Je crois que tout en cette vie a un sens… même la mort. Et je ne crois plus au fait que nous vivrons une séparation d’avec les nôtres, puisque cette vie se continu dans une autre dimension, sous une autre forme.  C’est ma croyance personnelle et je ne dis pas que vous deviez la partager…mais je vous invite de votre côté à vous poser sérieusement la question, à y réfléchir et à vous faire votre propre idée. Que croyez-vous ?

Hélène Giroux
Accompagnatrice, auteure, conférencière
Écrit en oct. 2016