Coeur d’enfant

Les enfants nous fascinent à peu près tous. Nous admirons leur spontanéité, leur fraîcheur et leur candeur. Ils n’hésitent pas à dire ce qu’ils pensent, à agir sur le coup de l’impulsivité. Ils sont branchés directement sur l’instant présent, ne se préoccupent pas de ce que pensent les autres et se laissent porter par leurs élans du cœur. C’est comme si le temps pour eux s’était arrêté et qu’ils vivaient dans un monde parallèle au nôtre, dans un espace où la magie et le mystère en font partie.

Je me rappelle que toute petite, vers l’âge d’environ 5-6 ans, je m’allongeais sur le trottoir et pouvait observer pendant des heures, de simples fourmis aller et venir dans leur nid. Je ne voyais pas le temps passer et était littéralement fascinée par ce qu’il m’était donné d’observer. C’était comme si j’entrais dans leur univers et que j’en faisais partie.

Suffit-il de grandir pour perdre cette connexion avec l’âme ? Je le crois de moins en moins. En fait cette petite partie de nous qui se nourrit dans l’imaginaire, la créativité et la joie de vivre est toujours quelque part tapie à l’intérieur de nous, dans un lieu secret qui cherche seulement à se protéger du regard d’autrui…car il n’est pas toujours bien vu qu’un adulte s’amuse comme le ferait un enfant.

Côtoyer des petits permet de faire des choses qu’un adulte ne fait pas souvent seul , par crainte du ridicule : faire un bonhomme de neige, regarder voler un cerf-volant, faire des bulles ou construire un château de sable sur la plage, lancer des cailloux dans l’eau…..

Je permets maintenant beaucoup plus souvent à mon enfant intérieur de s’exprimer, de vivre de ses passions, de se nourrir d’un peu de folie et c’est tellement agréable ! Je réalise en fait qu’il est davantage nécessaire de le libérer de ses carcans et de ses préjugés, alors que je suis dans le monde adulte qui permet peu cette spontanéité et ce regard plus léger sur l’existence.

Il n’y a pas d’âge pour retrouver son cœur d’enfant…il ne demande qu’à éveiller ma conscience sur les bienfaits qu’un peu de magie peut apporter dans ma vie. On a l’âge de son cœur, pas celui des années sur un calendrier…alors vivement les bulles et les jardins de fées !

Hélène Giroux
Accompagnatrice
Article en juillet 2016

Qu’est-ce qui reste à la fin ?

Et si je vous annonçais aujourd’hui qu’il ne vous reste que quelques semaines à vivre ? Oui, oui…. n’importe qui pourrait un jour ou l’autre avoir à faire cette réflexion dans son parcours. Et si vous preniez vraiment un peu de temps pour y réfléchir vraiment, pour en faire l’expérience ?

Est-ce vous voudriez par exemple, travailler plus d’heures pour pouvoir accumuler davantage dans votre compte de banque avant de partir ? Est-ce que vous encourageriez le fait d’avoir des relations conflictuelles avec votre entourage ? Est-ce que vous placeriez votre avoir à la bourse pour le faire fructifier ?Voudriez-vous vous procurer une voiture de luxe ?

Je ne vous connais pas personnellement, mais je suis certaine qu’aucune de ces réponses ne seraient la vôtre. Pourquoi ? Parce que quand le temps est compté et que la vie se raccourcit, toutes ces choses matérielles que l’on a accumulées ne veulent plus rien dire. Elles n’ont plus aucune importance car de toute façon, on n’emporte rien de tout cela de l’autre côté.

Qu’est-ce qui reste alors ? L’amour que l’on a reçu et distribué et celui que l’on peut encore donner ! Lorsqu’on fait le bilan à la fin de notre existence, ce sont seulement ces gestes posés ou ces attentions reçues, qui donneront du sens, pas seulement au temps passé ici-bas, mais aussi qui donneront du sens à la fin de notre voyage ici-bas.

Quant au moment du grand départ, on fera le bilan de cette vie qui fut nôtre, l’amour reçu et partagé sera ce qui nous apportera le plus de satisfaction intérieure et de joie; la joie d’avoir rempli notre mission, d’avoir semé de nombreuses petites graines qui feront à leur tour et au moment opportun, une différence pour autrui. Voilà notre raison d’être ici en ce monde.

Les qualités du cœur

J’ai le goût en ce mois d’avril rempli d’espoir d’un printemps prochain, de vous partager un moment très touchant vécu  avec mon père…Il vient d’être placé en soins prolongés et le choc était grand…son désir de vivre s’éteignait.

Dans la chambre à deux où il est placé, se trouvait une dame de 106 ans, qui vient de décéder partageant la même chambre que son fils lourdement handicapé, désormais seul. Ils habitaient là ensemble, depuis plusieurs années. Mon père remarque qu’il a peine à manger…..

N’écoutant que son grand cœur, mon père qui se trouve en fauteuil roulant (il a été amputé) et malgré son Parkinson qui le fait trembler, se met à le nourrir, doucement et patiemment. L’homme lui sourit et sait qu’il vient de trouver un allier. Qui sait si ce n’est pas la dame de 106 ans qui les a placés ensemble pour redonner un sens à ces deux vies…j’aime y croire.

Et tout à coup très concentré à la tâche, il entend une volée d’applaudissements et d’exclamations…il se retourne et là, au seuil de la porte se trouve les employés qui l’observent avec étonnement et ravissement. Ils n’en reviennent tout simplement pas…c’est le premier matin de mon père dans sa nouvelle habitation.

Mon père s’est mis à pleurer, le cœur rempli de joie d’avoir pu servir encore à quelque chose. En plus d’humaniser cet endroit et d’assurément susciter la réflexion chez un personnel souvent désabusé,  il vient de trouver un nouveau sens à sa vie en aidant plus démuni encore que lui-même. Son geste et la réaction suscitée m’ont émue aux larmes…

Je suis fière de lui et de la résilience qu’il démontre dans le contexte…..la vie est belle malgré ses bas qui nous bouleversent parfois…et je comprends d’où me viennent ces qualités d’empathie et de compassion qui caractérisent les bases de mon métier d’accompagnatrice auprès des personnes en fin de vie…merci papa !

Hélène Giroux
Écrit en avril 2016